Le christianisme et le Mbog

Bassa: en quête et découverte d'un peuple historique (série) 1ère partie
La grotte de Ngog Lituba.

Le christianisme est aujourd’hui la religion majoritaire dans notre pays et chez les Basaa-Bati-Mpoo. Mais il n’en a toujours pas été ainsi. Jusqu’au début du 20e siècle les notre peuple étaient attaché aux valeurs spirituelles du Mbog et les pratiquait. Les premiers missionnaires Joseph Merrick et Jackson Fuller débarquent dans notre pays en 1843; Alfred Saker quant à lui, arrive en 1845. (…) Ces missionnaires ont succédé aux négriers qui écumèrent le continent pendant près de quatre siècles. Ils sont arrivés avec les armées coloniales, la croix précédant assez souvent le fusil, quand ce n’était pas l’inverse et se sont appliqués méthodiquement à anéantir les fondements culturels des peuples qu’ils s’étaient fixés de soumettre.

Le tout-premier Chrétien Camerounais est baptisé en 1849 : un certain Békima Bilè, natif du village Bonapriso. Son nom de baptême sera Smith. Ainsi sera-t-il le premier de nos concitoyens à se voir greffer sur son identité, un prénom occidental. (…) De 1849 à 2023, cela fait très exactement 174 ans (seulement !), donc même pas 2 siècles! Sachons donc, que cela choque ou laisse à 37, que dans ce Cameroun, AUCUNE famille n’est Chrétienne depuis plus de 5 générations (SEULEMENT !!!), aucune.

Concernant le peuple de Ngog-Lituba, le roi Toko a autorisé en 1890 le père Vietel (qui dirigeait les premiers 8 prêtres Allemands qui ont apporté le catholicisme au Cameroun), à construire la première église à Tokoland (devenue Mariemberg) il y a eu plus tard une hostilité des populations Yakalag qui ne voulaient plus la présence de ces intrus sur leur sol. Le père Vietel fit appel au gouverneur allemand Von Putkamer qui envoya l’armée allemande.  On connaît la suite : des centaines de populations massacrées par l’armée allemande.

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Chez les Adie, on a eu en 1923 des dizaines de prêtres traditionnels : les  ( Bapepee et les mi njee)  tués ( avec des fusils) à l’île de Yamadag, où les Adiè avaient l’habitude de se réunir pour décider des affaires de la communauté. Presque toujours, les gardiens de la tradition et les clans qu’ils encadraient devaient choisir de se convertir à la nouvelle religion et à sa civilisation ou de mourir.

Les religions révélées ne sont pas arrivées chez pour notre intérêt. Il fallait conquérir ce vaste territoire abritant de nombreuses richesses du sol et du sous-sol. Après avoir étudié les peuples africains, et l’environnement, fut suivi par une l’agression armée et l’invasion coloniale de l’Afrique par les peuples européens. N’ayant pas pu nous soumettre totalement par les armes, il fallait un complément culturel, mental et religieux de la conquête. Les envahisseurs apportèrent alors l’idéologie de l’injustice sacrée par laquelle notre déchéance a commencé. Ils ont imposé un Dieu jaloux qui s’énerve juste pour une pauvre pomme croquée par un petit couple d’humains ignorants qui ne savaient même pas s’habiller. Et malheur à tous ceux qui ne croient pas en ce Dieu colérique et partial, car ils seront du combustible pour le feu de l’Enfer. Quid du Paradis?

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NGOG LITUBA a été le lieu de refuge des ancêtres alors qu’ils étaient pourchassés par les peuhls qui voulaient les islamiser. Après s’y être refugiés l’entrée fut obstruée par la toile tissée à toute vitesse par une araignée. Les ennemis du peuple Bassa passèrent devant le rocher et s’éloignèrent sans rien soupçonner, ce qui évita au peuple d’être massacré. Là, comme le dit la tradition, nos pères vécurent, et de là jaillit la formulation contemporaine de l’Initiation au MBOG que portèrent avec eux, tous les flux migratoires des BASSA-MPÔÔ-BATI du Cameroun, et qui font toujours remonter autant que faire se peut, leur arbre généalogique jusqu’à NGĒĒ NANGA ou NANGA NANGA.

MBÔMBÔLE comme on l’appelle en largue bati en tant que pôle initiatique, est donc le lieu de naissance de tous les initiés, et nécessairement, le lieu d’émission de toute l’influence spirituelle, ou alors devrions-nous dire « le foyer du champ de forces », qui porte la tradition du MBOG.

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En considérant que les descendants des premiers migrants partis d’Egypte s’installèrent à NGOG LITUBA vers le 9è siècle, on peut admettre que les civilisateurs européens qui entrèrent en pays BASSA rencontraient des peuplades ayant une formulation actualisée de leur vision du Cosmos et de la Vie datant d’environ dix siècles. La conversion fut si violente qu’un siècle plus tard, les rites et l’enseignement du MBOG avaient presque disparu sur le plan public.

Le plus  remarquable acte d’agression culturelle et traditionnelle fut l’installation de l’Eglise Catholique Romaine, ni plus ni moins qu’à NGOG LITUBA avec l’érection d’une croix au sommet du dôme rocheux. Cette machination a été orchestrée par un fils de ce peuple, premier Evêque BASSA de cette nouvelle religion, Monseigneur Thomas MÔNGÔ. Cet homme était naïf quant aux projets de son église sur ce lieu, mais il était sincère. C’est lui qui fut mis à contribution par l’Armée Coloniale pour négocier la reddition de Ruben UM NYOBE, Secrétaire Général de l’UPC, assassiné en 1958. On doit nécessairement ajouter qu’il obtint des clans BATI, d’organiser dès 1959, des pèlerinages à cette grotte pour « obtenir de Dieu, le pardon des nombreux péchés, pour les atrocités commises en pays BASSA ». Ce sacrilège s’explique avec cette citation de Jean Marie Adiaffi dans son livre « La carte d’identité(1980) » : Celui qui veut assassiner un peuple, détruira son âme, profanera ses croyances, ses religions, niera sa culture et son histoire.

L’histoire de l’Eglise Catholique au cours des seize derniers siècles dans le monde, rapporte des cas similaires d’appropriation de lieux de cultes anciens, de rites et fêtes d’autres religions pour les christianiser. Cela est fait dans le but de s’approprier la force spirituelle et les égrégores de ces peuples. Les cathédrales et lieux saints de cette religion, comme ceux d’autres religions, sont connus pour être des points particuliers d’émission ou de réception de l’énergie terrestre et cosmique.

Tous ces coups de boutoirs donnés au MBOG depuis l’arrivée du colon et du missionnaire blancs, et perpétués par les fils mêmes de ce peuple avec le regard indifférent, quand il ne fut pas bienveillant, pour ne pas dire avec la complicité des pouvoirs politiques en place, semblent viser de façon inquiétante quelque chose de précis : anéantir la base sur laquelle peut être construite une société juste et équitable, où sont nivelées les inégalités et où règne la solidarité véritable : « ANE I MALIGA NI TELEP SĒP » ou encore « LE GOUVERNEMENT PAR LA VERITE ET LA JUSTICE »,

Avec cette mise sous-tutelle notre peuple est sous la domination des forces extérieures. Tant que cela continuera nous ne pourrons pas nous épanouir et nous ne bénéficierons pas des bénéfices des valeurs du Mbog.

Le peuples Basaa-Bati-Mpo’o doit se réapproprier les valeurs héritées de ses ancêtres pour en bénéficier en vue de son épanouissement. Pour cela il faut nécessairement délivrer Mbômbôle de l’emprise négative du catholicisme romain. Les Mpèèpè, Mbombog, chefs de village et de cantons, élites, membres du clergé et forces vives de notre peuple sont interpelés.

TONYE HAGBE, Fils de Mbômbôle

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1 Commentaires

  1. 14 février 2024, 08:53

    JE SUIS TRÈS EMUE DE LIRE ET D’APPRENDRE TOUT CELA. MERCI DU FOND DU CŒUR POUR LE PARTAGE DE CONNAISSANCES ET DE VÉRITÉ.

    Cevapla
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