Bassa: en quête et découverte d’un peuple historique (série) 1ère partie

Bassa: en quête et découverte d'un peuple historique (série) 1ère partie
La grotte de Ngog Lituba.

Bassa, un peuple Bantou d’Afrique Centrale vivant au Cameroun, dans les régions du Centre, du Littoral et du Sud. On les retrouve dans les départements du Nyong-et-Kéllé, de la Sanaga-Maritime, du Nkam, du Wouri et de l’Océan. Plusieurs ethnies du Cameroun sont liées aux Bassa : Ewondo, Eton, Manguissa, Yambassa et Bafia entre autres… Le peuple Bassa est considéré de nos jours comme étant originaire de Ngog Lituba. Remontons l’histoire.

Ethnonymie

Plusieurs sous-groupes se sont constitués depuis leur départ. Selon les sources, on peut rencontrer de multiples variantes de l’ethnonyme: Bassa, Betjek, Bikyek. Le terme Bassa est le pluriel de Nsa’a qui peut se traduire par partage ou rétribution. La légende voudrait qu’une dispute ait eu lieu entre les fils d’un ancêtre Bassa commun appelé Mban. Cette dispute concernait le partage d’un gibier après le retour de la chasse au village. Il s’agissait d’un serpent. À l’issue de cette dispute, les protagonistes furent surnommés Bassa, qui se traduit par « les ravisseurs ». Cependant le vocable Bassa le plus ancien nous vient de l’Égypte sous le terme Umm Usuda. Par la suite les textes Portugais postérieurs à cette époque utilisent les vocables Mascha, Easha, Biafra, Biafaré pour désigner les Bassa.

 

Migration

Les Bassa désignent leur histoire la plus ancienne sous le nom de « légendes et mythes » : Mbog kôba ni kwân. Les griots, poètes et généalogistes définissent trois grandes périodes de l’histoire des Bassa. La première grande période s’appelle Kwan (période allant de l’origine jusqu’au XIXe siècle av. J.-C.), la seconde période est Kôba (période des légendes du XIXe siècle av. J.-C. au XVe siècle) et la dernière période, Len (période allant du XVe siècle à nos jours).

De l’Égypte aux bords du lac Tchad

La tradition orale situe les origines du peuple Bassa en Égypte antique ou dans l’ancienne Nubie, à la frontière de l’Égypte et du Soudan, près du Nil. Après plusieurs invasions (pharaoniques, éthiopiennes et arabes) de la Nubie, et des catastrophes naturelles comme les inondations, les Bassa se seraient éloignés le plus loin possible du Nil en traversant les déserts africains pour descendre vers le sud-ouest.

Ils s’établissent ensuite progressivement au Kanem Bornou où ils occupent la vallée du Logone sur les hauts plateaux de l’Adamaoua. Ensuite, ils longent le fleuve Logone pour se réfugier à Guelingdeng avant de se terrer dans les monts Mandara entre le Cameroun, le Nigéria et le Tchad actuels, qui rappellent les paysages de la Nubie. Mais les conquêtes arabes les délogent et les dépouillent de leurs trésors. Durant cette migration, ils s’associent à d’autres groupes dans l’espace et le temps. De ce fait, on retrouve les Bassa au Bénin, en Gambie, au Kenya, au Liberia, en République démocratique du Congo, au Sénégal et en Afrique du Sud

Entrée de la grotte de Ngog Lituba

Les hauts-plateaux de l’Ouest déversent ses eaux dans les bassins du Nil, du Congo et du Niger. Le peuple Bassa suivra ces itinéraires. Ainsi, quittant le centre du Cameroun, les Bassa descendent vers l’ouest et vers le sud, dans des zones forestières moins accessibles aux peuples conquérants. Fidèles à leur logique de rester près des cours d’eau, ils suivent un affluent de la Sanaga, la Liwa, pour se retrouver sur la rive droite, au lieu-dit Ngog Lituba. Les Bassa s’identifient dans leur totalité comme étant les descendants de ceux qui habitaient Ngog Lituba, c’est un de leurs mythes fondateurs : Bon ba ngog lituba « les enfants du rocher percé ».

 

De Ngog Lituba au bord du Wouri

À la veille du XVe siècle, Ngog Lituba s’avère être assez étroit pour le peuple Bassa, le besoin de trouver plus d’espace devient alors pressant. L’éclatement des familles nommées ci-dessous est l’objet de plusieurs versions. Pour certains, cela est la conséquence des désaccords entre ces familles, ce qui aurait conduit certaines à l’exil. Pour d’autres, c’est la suite logique de leur longue marche jusqu’aux bords du Wouri. Certains s’installèrent dans la vallée inférieure de la Sanaga. Il s’agit des Yabakalag, des Balimba, des Yassoukou et des Pongo. D’autres familles traversèrent la Sanaga en plusieurs endroits. Ce fut le cas des Bikôk, des Ndôg Njee, des Eséka, des Dôk Béa de Makak, des Ngase d’Edéa, des Yabi, des Bakoko; d’autres s’enfoncèrent dans les forêts de Yabassi et du Haut Nkam. Ceux qui s’installèrent sur les deux rives du fleuve Nkam étaient les Ewodi, les Bodiman et une partie des Bakoko. D’autres clans émigrèrent plus loin pour atteindre les postes de Mbanga et de Nkongsamba. Il s’agissait des Abo et des Mbo.

 

Parmi les familles demeurées à Ngog Lituba, on compte majoritairement les Bambimbi mais aussi les Basso Ba Likol. Les migrations prendront fin avec la barrière de l’océan Atlantique et l’arrivée des Européens. Installés dans cette zone côtière, les Bassa continueront leurs activités habituelles de cultivateurs, pêcheurs et chasseurs, entretenant une intense activité commerciale avec les Malimba, Duala et Bakoko.

Le contact avec les Européens [1472 – 1960]

L’influence portugaise, entre 1472 et 1578, n’a pas été directe concernant le peuple Bassa, qui leur doit cependant l’introduction de certains fruits américains venant de Sao-Tomé et Fernando Poo, notamment l’avocat, la papaye, le cacao et la canne à sucre. Ces espèces végétales feront beaucoup plus tard la richesse des Bassa en général et du Cameroun en particulier. Les Hollandais et les Anglais se contenteront d’effectuer la traite le long de la côte occidentale d’Afrique sans avoir pour autant une profonde influence sur le peuple Bassa.

Les premières résistances connues débutent avec l’arrivée des Allemands dès 1884. Le Major Hans Dominik le décrit comme un peuple de résistants, qui lui fera perdre plusieurs de ses hommes lors de la bataille de Kan, dans l’actuelle Sanaga Maritime, au cours de la période allant de 1885 à 1907. Cependant les Allemands, après avoir pacifié leur relation avec les autochtones, entreprirent de nombreux chantiers ayant majoritairement trait à la culture du cacao, créant plusieurs centres dans les villages de Makak, Eséka, Longone, Nkan, Omeng, Nyambat… Les Allemands construisirent aussi une ligne de chemin de fer qui s’arrêta à Njok. La période française débute en 1919, sous le régime de l’indigénat (travaux forcés), entamé sous les Allemands. Les Français ouvrent un poste administratif en territoire Bassa à Ngambe dans la localité de Bambibi, en 1927.

Lors de la Deuxième Guerre mondiale, beaucoup de Bassa s’enrôlent auprès des Français pour combattre les armées allemandes. De retour au pays, et du fait des idées reçues en Europe durant la Deuxième Guerre mondiale, les Bassa s’uniront à d’autres autochtones pour former des mouvements indépendantistes. Le plus connu des indépendantistes Bassa se nomme Ruben Um Nyobe. Le Cameroun obtient son indépendance le 1er janvier 1960.

A suivre…

S.D.

 

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